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Comment fait-on moralement pour défendre des criminels ?

Me Louis-Alexandre Martin -29 avril 2019

Il est maintenant temps de répondre à cette épineuse question qui brûle toutes les lèvres.

Mentionnons d’entrée de jeu que tout le monde est présumé innocent jusqu’à preuve du contraire, laquelle preuve doit être faite hors de tout doute raisonnable. C’est la présomption d’innocence. Elle est protégée à l’alinéa 11d) de la Charte canadienne des droits et libertés.

Un individu ne devient donc « un criminel » que lorsque l’agir délictuel a été dûment prouvé selon la norme de preuve applicable et que la Cour d’appel n’a pas renversé la décision de culpabilité.

C’est le principe de la présomption d’innocence en tant que tel que le criminaliste défend et qui guide toutes ses actions. En se concentrant sur le principe, il évite autant que faire se peut de personnaliser le débat.

Bien que ce soit difficile à concevoir pour le commun des mortels, les règles déontologiques de la profession d’avocat obligent le criminaliste à défendre avec la même vigueur un client coupable. Seulement, dans ce cas de figure, plusieurs moyens de défense ne sont pas ouverts. À titre d’exemple, il ne peut pas plaider l’alibi, s’il sait que son client a commis le crime. De la même manière, il ne peut pas permettre qu’un client qu’il sait coupable donne une version disculpatoire sous serment. Ce serait de se rendre complice d’un parjure. En tant qu’officier de justice et citoyen, agir de la sorte serait totalement inacceptable et passible d’une sentence exemplaire.

S’il sait son client coupable du crime, il lui est en revanche possible de soulever un doute raisonnable en attaquant la preuve de la Couronne, sans faire témoigner son client, et ce, en vue d’obtenir l’acquittement.

Si son client lui dit qu’il est coupable, cette information est aussitôt protégée par le secret professionnel. À moins que certaines exceptions strictes trouvent application, personne ne sera donc informé de cette importante confidence. Comme l’accusé n’est jamais obligé de témoigner, le juge ne pourra conclure que son client est coupable simplement parce qu’il n’a pas témoigné.

C’est important de préciser que le criminaliste ne cautionne pas les faits et gestes de ses clients. Il a plutôt comme tâche de demeurer indépendant, mais loyal, et de les défendre becs et ongles, en mettant de l’avant tous les moyens – légaux et éthiques – à sa disposition. C’est là son travail à titre d’avocat de la défense. Il un rôle de contrepoids à jouer. Il est le dernier rempart contre l’arbitraire de l’État.

Après lui, c’est la potence.

Comme société, nous avons choisi de ne pas lyncher les accusés. Nous leur avons permis de se défendre pleinement et entièrement et avons élevé ce droit au rang de droit constitutionnel.

C’est le propre des sociétés démocratiques un tant soit peu évoluées comme la nôtre.

 

 

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